Jour 45 : Etape 18 : Boromo-Ouagadougou (176km) + Rencontre avec Bill Wallace
Pas de Côte d’Ivoire pour OMFL : Volume 1
Comme prévu, la propriétaire du Sama Camp est de retour au petit matin.
C’est une chanteuse locale qui était en déplacement en Côte d’Ivoire. Elle m’explique le chaos qui reigne là-bas à cause du conflit actuel qui oppose les partisans de Gbagbo, président actuel à ceux de Ouatarra, qui veulent le déloger du pouvoir.
Elle me dit qu’il ne faut surtout pas que j’aille dans ce pays en voiture tout seul car je risque de tout perdre. C’est apparement super chaud pour les étrangers à l’heure actuelle.
Pour une fois, je décide d’être raisonable. Je n’irai malheurensement pas en Côte d’Ivoire. Encore une partie du projet qui tombe à l’eau… Disons que ce n’est que partie remise, car ce pays m’intéresse énormément !
La route est mauvaise et Isouf nage en plein rêve…
Isouf, qui travaille au Sama Camp, m’a proposé la veille de m’accompagner pour me servir de guide.
Il a grandi à Ouagadougou et dit connaître la ville comme sa poche. De plus il a de la famille à voir sur place et veut faire d’une pierre deux coups.
Après le repas de midi, je rassemble l’équipe de l’auberge pour prendre une photo souvenir et leur dire au revoir.
J’ai vraiment apprécié cet endroit simple et rustique, où l’accueil fut vraiment irréprochable.
A la sortie de Boromo, je me rends très vite compte de l’état lamentable de la route et il m’est strictement impossible de rouler vite sans risquer d’endommager la voiture.
Isouf est en train de prier pour qu’il ne nous arrive rien. Il parle malheureusement assez mal français et la communication est un peu compliquée.
En chemin il tente de m’expliquer qu’il aimerait venir en France pour cultiver des légumes sur un petit bout de terrain et les vendre pour gagner sa vie. Il pense qu’en arrivant en France il pourra se poser là où il y a de l’herbe et planter ce qu’il désire sans rien demander à personne.
Selon lui, en faisant ça pendant 2 ans il pourra revenir au pays pour se payer un terrain et y construire une maison.
J’essaie tant bien que mal de lui expliquer que c’est strictement impossible mais il ne se rend pas compte des choses.
Il fait partie de ceux qui croient que gagner beaucoup d’argent en France est chose facile…
Faire comprendre le contraire à ceux qui voit l’Europe comme un paradis est extrêmement compliqué car ces derniers sont vraiment persuadés du contraire. Ils croient qu’on leur dit que la vie en Occident est dure pour les dissuader de venir faire fortune et garder l’argent…
On perd énormément de temps à slalomer les trous et j’ai l’impression de ne pas avancer. Après environ 80 kilomètres, je suis soulagé de constater que le goudron redevient potable.
Sur le bord de la route, des enfants vendent des mangues, karités, œufs de pintade, etc…
Tous les 500 mètres environ, on trouve un groupe qui attend en retrait, dès qu’une voiture arrive ils apparaissent en exhibant leurs marchandises.
Isouf m’exprime son souhait d’acheter des œufs pour les offrir à la famille en arrivant. Je m’arrête au prochain rassemblement et les vendeurs juvéniles encerclent immédiatement la voiture! Je leur dis que ce sont des œufs qui m’intéressent et j’en achète 30 pour 2000 Fr CFA (3€). On prend aussi quelques fruits pour la route.
Nous sommes presque arrivés à destination et le soleil va bientôt nous lâcher.
Le Burkina Faso se trouve à l’extrême est du fuseau horaire et la nuit arrive très très tôt.
Juste avant l’entrée de Ouagadougou, on a le droit à un contrôle de douane qui est très vite réglé sans le moindre problème.
Isouf ne m’a pas tout dit… je ne sais pas encore ce qu’il cache
A Bobo-Dioulasso on m’avait prévenu que la capitale été en reconstruction et je m’en aperçois très vite aux portes de la ville où de multiples déviations nous empêchent de trouver notre chemin. Isouf me fait savoir que les rues principales ont beaucoup changé depuis sa dernière venue et il m’avoue être perdu d’entrée de jeu.
Pour la première fois depuis mon départ, je vois des panneaux routiers originaux qui ne sont ni sur le modèle français, ni sur le modèle anglais !
La direction du stade du 4 aout où nous avons rendez-vous est indiquée.
Je suis sauvé car je n’étais vraiment pas chaud pour conduire de nuit à Ouaga, surtout sans savoir où je vais.
Abdulaye, l’ami d’enfance d’Isouf, nous attend au pied de l’arène confortablement assis sur sa mobylette.
Une fois les présentations faites, j’apprends que mon accompagnateur n’est plus venu ici depuis 10 ans et son ami est très étonné de le revoir car il était sans nouvelles depuis… Je me demande alors si c’est censé être inquiétant ou pas car il ne m’avait pas du tout parler de ça!
Il nous demande de le suivre.
Le quartier de Nonsin & « Bill Wallace »
On arrive dans le quartier de Nonsin à l’ouest de Ouagadougou. Les routes ne sont pas goudronnées dans le quartier et je ressens le sol boueux dans l’obscurité.
Abdulaye vit avec sa mère dans une maison en construction, il n’y a pas encore le courant et 1 seule chambre est habitable. Sa mère est en train de préparer le repas et je la salue.
Il nous dit qu’il va appeler un homonyme qui a de la place pour nous, il se fait surnommer « Bill Wallace » et est aussi un ami d’enfance d’Isouf.
Pendant la courte attente, les moustiques me dévorent les chevilles et je comprends très vite que Ouagadougou est vraiment infesté par ces parasites pendant la saison des pluies.
C’est encore pire qu’à Bamako, en seulement une poignée de minutes j’ai déjà été piqué plus de 15 fois !!
Je suis comment dire… dans la merde !!!
Il fait nuit noire et le fameux Bill Wallace nous rejoins vêtu d’un bonnet alors qu’il fait plus de 35° !
Tout comme Abdulaye sa stupéfaction à la vue d’Isouf est grande.
Il accepte de nous héberger sur le champ et nous rapatrie chez lui.
Il habite quelques maisons plus loin et me conseille clairement de garer l’AX dans la cour car on ne sait pas trop ce qui se passe pendant la nuit dans les rues du quartier.
L’entrée est très étroite et la manœuvre n’est pas du tout évidente à réaliser…
On salue la maman qui ne parle pas un mot français puis notre hôte nous montre sa chambre.
Je découvre une petite pièce équipée d’un lit et d’une moustiquaire ainsi qu’un banc assimilable à un canapé.
Sur une table basse se trouve une télé à écran cathodique de la fin des années 80, l’image en noir et blanc brouillée par la mauvaise réception nous retransmet un match de foot de la coupe du monde en Afrique du Sud.
Douche à ciel ouvert et orage sur le coin de ma face
Wallace me propose de prendre un « bain ».
J’en ai bien besoin car il fait une chaleur sans nom.
Il remplit donc un seau d’eau et l’amène dans la « salle de bain ».
Il fait super nuit mais je distingue un trou recouvert d’un bout de taule rouillée. Ce dernier donne directement sur une énorme fausse septique qui fait office de toilettes. Je comprends donc qu’il n’y a pas le tout à l’égout dans ce quartier de la ville.
Contrairement aux autres endroits où j’ai eu à me laver au seau je n’ai cette fois-ci pas de petit récipient pour me verser l’eau sur le corps. Je dois m’accroupir et prendre l’eau au creux de ma main pour me mouiller puis me rincer. Pas évident du tout quand on n’a pas l’habitude !! Pourtant ça fait des mois que je me lave au seau !
Au loin, j’entends le tonnerre qui gronde et je commence à m’activer car la douche est à ciel ouvert et il ne vaut mieux pas qu’il pleuve sur mes habits.
J’ai le temps de finir mais un violent orage explose au moment où je me rhabille…
Je suis complètement trempé à mon arrivée dans la chambre!
Mon hôte m’explique qu’en cette saison il pleut des fois pendant des journées entières, ce qui n’empêche pas les habitants de sortir pour aller chercher ce dont ils ont besoin.
Il dégaine d’ailleurs un parapluie et enfourche son vélo pour aller chercher des spirales contre les moustiques, du café et du sucre pour notre petit déjeuner, de l’huile et du pain. Il a aussi besoin d’une antenne car la reception est catastrophique.
A son retour il nous prépare une omelette et la met dans une miche de pain qu’il divise en 3 parties. Les œufs de pintade, qui ont de plus gros jaune que ceux de poule, ont sensiblement le même gout que ces derniers.
Bill Wallace parle extrêmement bien français, il me raconte qu’il a appris la langue seul et que c’est très important pour lui de la maîtriser. Il fait partie de l’ethnie Mossi majoritaire dans la capitale Burkinabée.
Il joue d’un instrument africain appelé koundé (khalam au Sénégal). Il l’a fabriqué lui-même et m’exhibe fièrement sa création. Chaque exemplaire de koundé donne des sons différents, en effet vu que les cordes sont placées sans mesures précises, il est impossible d’en trouver 2 pareils.
L’orage durera jusqu’à ce qu’on se mette au lit. Wallace me prête le sien et dormira au sol sur une des couvertures que j’avais dans la voiture. Isouf est bien installé sur le canapé. Le toit en taule a bien emmagasiné la chaleur de la journée et trouver le sommeil dans cette petite pièce à 3 n’est pas évident du tout.